La déclaration a été adoptée lors de la conférence « Avortement sécurisé dans les Caraïbes : de la loi à la pratique » organisée du 6 au 8 mai 2005 à Antigua-et- Barbuda par l’Initiative Caraïbes sur l’avortement et la contraception de Saludpromujer, Ecole de médecine, Université de Puerto Rico, et l’Université de Picardie JulesVerne, Amiens, France, en collaboration avec le bureau régional du Conseil de la population pour l’Amérique latine et les Caraïbes, Ibis Reproductive Health et Gynuity Health Projects.

caribbean_logoLa déclaration a été adoptée lors de la conférence « Avortement sécurisé dans les Caraïbes : de la loi à la pratique » organisée du 6 au 8 mai 2005 à Antigua-et- Barbuda par l’Initiative Caraïbes sur l’avortement et la contraception de Saludpromujer, Ecole de médecine, Université de Puerto Rico, et l’Université de Picardie JulesVerne, Amiens, France, en collaboration avec le bureau régional du Conseil de la population pour l’Amérique latine et les Caraïbes, Ibis Reproductive Health et Gynuity Health Projects.

Ont participé à la conférence quelque 50 obstétricien-ne-s/gynécologues, médecins généralistes, infirmières, agents du planning familial, inspecteurs de la santé, décideur-e-s politiques, chercheur-e-s et militantes pour les droits des femmes de 14 pays des Caraïbes dont Anguilla, Antigua-et-Barbuda, Barbade, Curaçao, Dominique, Guadeloupe, Guyana, Jamaïque, St Eustatius, St Martin, Puerto Rico, St Kitts-et- Nevis, Ste Lucie et Trinité-et-Tobago.

CONSIDERANT QUE :

1. « Sur les 210 millions de grossesses estimées chaque année dans le monde, environ 46 millions (22 pour cent) se termine par un avortement provoqué. La grande majorité des femmes sont susceptibles de connaître au moins un avortement d’ici leur quarante-sixième année » (OMS, 2003, Safe Abortion: Technical and Policy Guidance for Health Systems, (Avortement médicalisé : Directives techniques et stratégiques à l’intention des systèmes de santé), p.12; Alan Guttmacher 1999)

2. L’avortement, que ce soit pour interrompre une grossesse non désirée ou pour des impératifs de santé, est largement pratiqué dans les Caraïbes, légalement ou illégalement. Il s’explique par un besoin des femmes, par la déontologie des professionnels de santé et par la reconnaissance par les Etats de la réalité de l’avortement ;

3. L’avortement sécurisé présente un faible risque et est peu coûteux pour les établissements médicaux, alors que les avortements non sécurisés présentent des risques considérables pour la santé et la vie des femmes et entraînent des frais élevés pour les systèmes de santé ;

4. Dans les pays des Caraïbes où l’avortement volontaire est interdit, pour pratiquer des avortements dans des conditions sûres, les femmes et les prestataires de santé doivent transgresser la loi et les Etats tolérer des activités illégales ;

5. Le taux de mortalité, due aux complications liées à un avortement pratiqué dans de mauvaises conditions de sécurité, chez les femmes des Caraïbes vivant sous une législation restrictive en matière d’avortement est de 200 à 500 fois plus élevé que celui des femmes ayant accès à des avortements légaux aux Etats-Unis, en Angleterre, aux Pays-Bas et en France ; (ces estimations se basent sur les données publiées par l’OMS et l’Institut Alan Guttmacher)

6. Dans les Caraïbes, dix ans après la légalisation à Barbade, le nombre d’admissions hospitalières pour complications après avortement a énormément baissé et les admissions pour septicémie ont diminué de 70% (statistiques officielles fournies par le Directeur du service des statistiques médicales de l’hôpital Queen Elizabeth en 1993-94) ; en Guyana, six mois après l’entrée en vigueur de la loi libérale de 1995, les admissions pour complications après avortement dans ce même hôpital ont chuté de 41% (Reproductive Health Matters, mai 1997)

7. Les lois restrictives sur l’avortement (a) discriminent les femmes en imposant des réglementations qui nuisent à la santé de celles en âge de procréer (b) créent des inégalités face à l’accès à l’avortement, perpétuant ainsi l’injustice sociale et (c) vont à l’encontre des engagements pris par les Etats sous la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et autres accords internationaux.

NOUS,
les professionnel-le-s de la santé, chercheur-e-s et militantes agissant pour le bien-être des femmes

1. Affirmons le droit de toutes les personnes à accéder à des services de santé sexuelle et reproductive de qualité ;

2. Insistons sur l’importance de renforcer et d’élargir l’accès à la contraception et à la contraception d’urgence pour toutes les femmes et tous les hommes.

3. Appellons à la dépénalisation de l’avortement dans tous les pays des Caraïbes de façon à pouvoir :
a. donner aux femmes les informations, le soutien et l’accès à des méthodes d’avortement sécurisé ;
b. former les prestataires de services de santé de façon adéquate pour qu’ils/elles pratiquent des avortements sécurisés et fournissent des soins post-avortement dans le respect des normes médicales établies scientifiquement ;

4. Appelons à la reconnaissance officielle du fait que les raisons d’interrompre une grossesse sont d’ordre individuel et ne peuvent être imposées aux femmes par des institutions, qu’elles soient étatiques, médicales, sociales, culturelles ou religieuses ;

5. Appelons à la reconnaissance officielle par le gouvernement et les services éducatifs, sanitaires et sociaux que l’avortement sécurisé est :
a. un droit essentiel des femmes, porteur d’un moindre risque pour leur santé et pour d’éventuelles nouvelles grossesses s’il est pratiqué dans de bonnes conditions médicales et par des praticiens formés, alors que les avortements non sécurisés comportent un risque élevé de complications lorsque les femmes ne peuvent accéder à des informations et des services afférents ;
b. un aspect essentiel de la formation et des prestations de services en gynécologie ;
c. une occasion d’éduquer sur la contraception et l’autodétermination sexuelle ;

6. Appelons à la responsabilisation de la société civile et des gouvernements des Caraïbes face aux femmes et toutes les couches des sociétés des Caraïbes en leur assurant l’accès aux soins de santé sexuelle et reproductive, quels que soient leur âge, leur statut marital, leur classe sociale ou leur nationalité d’origine.

Manifestez votre adhésion et faites part de vos questions et remarques aux directrices de l’Initiative Caraïbes Yamila Azize-Vargas, Université de Puerto Rico, yazizevargas@gmail.com, et Gail Pheterson, Université de Picardie, France, gail.pheterson@csu.cnrs.fr.